Un petit polar pour commencer la semaine ? Et si je vous parlais d’Alabama 1963, un roman de Ludovic Manchette et Christian Niemiec qui ressuscite les USA du début des sixties. Dans la ville de Birmingham en août 1963, une fillette a disparu. Elle s’appelle Dee-Dee et la police ne semble pas tellement s’en préoccuper. Elle n’est d’ailleurs pas la première à disparaître. Et elle ne sera pas la dernière. Le point commun entre ces fillettes portées disparues : elles sont noires.
Bud et Adela, un tandem noir et blanc pour Alabama 1963
Alabama 1963 propose une intrigue de polar assez classique. Disparition, enquête, rebondissements, dénouement. L’originalité est le cadre spatio-temporel et la prépondérance accordée aux conditions dans lesquelles les Afro-américains vivaient à cette époque-là.
L’héroïne de ce roman est Adela Cobb, une femme de ménage, veuve et mère de famille, qui va tenter de résoudre cette enquête en dépit de son illettrisme et des obstacles que la société raciste va dresser sur sa route. Puisque les policiers blancs semblent peu pressés de résoudre les crimes qui frappent la communauté noire, il faut bien que quelqu’un s’y colle.
Nous suivons donc Adela tout au long des chapitres de ce roman et découvrons avec elle les personnages qu’elle rencontre. C’est avec Bud Larkin, détective privé bougon et alcoolique, qu’elle va former un duo inattendu pour faire progresser cette enquête. Mais les observations pleines de bon sens des autres femmes de la communauté afro-américaine de Birmingham vont également permettre à Adela de mieux comprendre les événements. J’ai particulièrement aimé toutes les scènes qui se passent à la laverie où l’on retrouve Fran, Renee et Albertine, trois commères qui commentent toute l’intrigue.
Il faut dire qu’avant d’être romanciers, Ludovic Manchette et Christian Niemiec étaient traducteurs et adaptaient en français des dialogues de séries et de films américains… les scènes de dialogues du roman sont donc plutôt réussies.
Un premier roman agréable
Comme je vous le disais, cette enquête ne brille pas par son originalité car sa construction est un peu trop classique. Mais il a le mérite d’être de bonne facture et de se lire agréablement. Au-delà de l’enquête en elle-même, la peinture des mœurs et l’Histoire des USA en 1963 (l’assassinat de JFK, le discours mythique de Martin Luther King, la Marche sur Washington pour l’emploi et la liberté…) est le véritable sujet de ce polar.
On comprend donc pourquoi Alabama 1963 a été plusieurs fois primé depuis sa parution : « Talent Cultura », Prix du Jury du Salon du Livre d’Île-de-France, Prix Jeune Mousquetaire du Premier Roman, Prix Littéraire des Étudiants Internationaux, Prix Palissy et Prix Ouest. Beau palmarès, n’est-ce pas ?
Qui a écrit cet article ?
Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.