Quelle soirée formidable à la Halle aux Grains ! Hier soir, le pianiste Chucho Valdés était l’invité des Grands Interprètes pour le plus grand bonheur des Toulousains venus l’écouter. Avec son Big Band, ils ont mis le feu ! Pour l’occasion, il y avait beaucoup plus de jeunes dans les gradins que lors des autres soirées de concert et grâce à la musique de ce virtuose, je pense que tout le monde s’est senti rajeunir d’au moins vingt ans !
Chucho Valdés et ses rythmes afro-cubains
Si la formation de Chucho Valdés est classique, les influences de sa musique se tournent plutôt vers le jazz et les musiques créoles. Celui qui a commencé le piano à l’âge de trois ans a consacré sa vie à la musique sous toutes ses formes et est ainsi devenu l’un des plus grands virtuoses de son époque.
Il fallait hisser Chucho jusqu’au tabouret de son père quand, à 3 ans, il entreprit de tâter du clavier en y exprimant un talent précoce. Deux années plus tard, il hérita même de son propre professeur de Bebo, Oscar Muñoz Bouffartique qui lui enseigna le classique et le chaperonna pour son premier concert, à 9 ans, une sonate de Mozart et une sonatine de Beethoven. Chucho Valdés a fait ses gammes très tôt, pour s’en émanciper d’autant plus vite.
Programme du concert du 26 novembre 2022
J’ai adoré les morceaux qui se sont enchaînés dans lesquels ont pouvait entendre des citations d’Erik Satie à Michel Legrand, en passant par Rimski-Korsakov et Gershwin. On sent que Chucho Valdés aime la musique sous toutes ses formes en dépit des frontières et des époques. D’ailleurs, le pianiste cubain partage la scène avec des musiciens venus de tous horizons, démontrant ainsi que la musique trouve ses racines partout et qu’il n’y a de beauté que métissée.
Le piano au rythme des batás
Ce qui donne son énergie folle au concert, c’est le dialogue permanent entre le clavier et les percussions. Chucho Valdés, côté jardin de la scène, laisse toute la lumière à Roberto Jr. Vizcíno qui se déchaîne pendant une heure et demie aux percussions. Son solo de batás a été l’un des temps les plus forts de la soirée, l’audience était scotchée par tant de virtuosité !
Au chant, Erick Barbería et Yeny Valdés ont apporté au concert une dose de spiritualité. En effet, La Creación se présente comme un hommage à Olodumare, divinité supérieure du panthéon yoruba.
Par sa dimension épique, l’ambition de La Creación est, toutefois, bien plus vaste, « une histoire de rédemption et de liberté » divisée en quatre parties, qui intègre dans son écriture des éléments de santería, de musique d’Afrique de l’Ouest, le blues, le jazz, le tout dans une atmosphère que Valdés compare volontiers à l’album Bitches Brew de Miles Davis.
Programme du concert du 26 novembre 2022
J’ai adoré découvrir La Creación sur la scène de la Halle aux Grains, que le pianiste lui-même considère comme son chef-d’œuvre. Si Chucho Valdés passe près de chez vous, n’hésitez pas à aller l’applaudir avec ses nombreux musiciens. Leur musique est une véritable invitation au voyage.
Depuis le début de la saison, la programmation des Grands Interprètes est un sans-faute. Après les concerts de l’Ensemble Pygmalion, puis de Cecilia Bartoli, Grigory Sokolov et maintenant Chucho Valdés, on a le sentiment de n’assister qu’à des moments exceptionnels sur la scène de la Halle aux Grains. Le prochain rendez-vous arrive vite, puisque ce sera le Harlem Gospel Choir qui sera invité à interpréter le 5 décembre prochain les grands classiques du gospel américain et les chants de Noël : un concert parfaitement de saison, donc !
Alors, serez-vous au rendez-vous ?
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.