Contemporary Dance 2.0 est un spectacle que j’ai bien failli ne pas voir. Et pourtant je m’en serais voulu car il s’agit d’une pièce dansée qui m’a littéralement bouleversé. J’avais envie de voir un ballet du chorégraphe Hofesh Shechter depuis un bon moment. Depuis que je l’ai découvert dans le film En corps de Cédric Klapisch. Donc dès la rentrée, lorsque j’ai vu qu’un de ses spectacles était programmé à Foix (à une heure de Toulouse) à l’Estive, j’ai sauté sur l’occasion. L’avantage quand on réserve tôt, c’est qu’on peut choisir une bonne place. Bref.
Hier soir, je me présente au théâtre une bonne heure à l’avance. Au moment de l’ouverture des portes, je me présente à l’ouvreuse et lui tend le billet à scanner. La machine ne réagit pas. Elle insiste. Toujours pas de passage au vert. « C’est pas le bon » qu’elle me dit. Pas le bon quoi ? « Pas le bon jour ». Et là – malédiction – je me rends compte que le billet que j’avais acheté était pour le mardi soir et non pour le mercredi ! Je suis venu un jour trop tard.
Je me rue au guichet pour acheter un nouveau billet. « Désolé, le spectacle affiche complet, il n’y a plus aucune place à vendre ». Arghhh ! Je m’en veux d’être aussi étourdi. « Mais attendez sur le côté, si à la dernière minute des places se libèrent, on vous fera entrer ». Sur le côté, déjà 6 personnes attendent… Je me mets dans la file et j’attends patiemment jusqu’à 20h30 que la salle se remplisse et que les rangs se resserrent. À 20h31, les ouvreuses ont fait le compte des places inoccupées. « On va pouvoir vous faire rentrer ». Alléluïa ! À 20h38, j’ai acheté un nouveau ticket et je suis installé dans la salle, sur un strapontin. À 20h45, la lumière s’éteint et la magie commence enfin.
Shechter II, la jeune compagnie d’Hofesh Shechter
Le spectacle Contemporary Dance 2.0 est un ballet de 55 minutes interprété par 8 danseurs de la compagnie Shechter II. C’est le programme de développement de la Compagnie Hofesh Shechter pour la prochaine génération d’artistes émergents, de 18 à 25 ans – une jeune compagnie de jeunes danseurs sélectionnés tous les deux ans, parmi les meilleurs danseurs mondiaux.
Cette compagnie parcourt les salles de toute l’Europe et recrée les œuvres d’Hofesh Shechter les plus renommées. Le spectacle original avait été créé en 2019 pour la GöteborgsOperans Danskompani et a été réimaginé pour Shechter II avec une sélection éclectique de sons, de l’euphorie des clubs aux basses qui tremblent, en passant par le hip-hop vibrant, la folk, Bach ou même le jazz et la variété. Vous l’avez compris, musicalement, c’est intense !
Contemporary Dance 2.0, un ballet en cinq parties
55 minutes. C’est très court. Le ballet ne souffre pourtant d’aucun temps mort. À peine quelques secondes de respiration entre les différentes parties de la pièce, qui sont au nombre de cinq : Pop ; With feelings ; Mother ; Contemporary Dances ; The end.
Tout va tellement vite ! Pas le temps d’imprimer une image sur votre rétine, une autre est déjà en train de se construire. Les danseurs offrent une performance à couper le souffle. Littéralement. On retient sa respiration devant cette chorégraphie débordante de vie. D’ailleurs, le spectacle commence comme un vraie claque : pas le temps d’éteindre la lumière dans la salle qu’elle s’allume sur la scène, les danseurs déjà en place, la musique à fond les ballons, les bpm à leur maximum.
Pour sublimer les tableaux, la lumière de Tom Visser est magnifique. Je pense qu’en terme d’éclairage, c’est l’un des spectacles les plus beaux et les plus aboutis que j’ai vus dans ma vie. J’ai adoré les contre-jours, les semi-obscurités dans lesquelles les silhouettes se devinent à peine, les douches de lumière colorées qui, mélangées à la fumée, créent une profondeur onirique.
La Part IV est clairement celle que j’ai le moins aimée. Volume musical et sonorités volontairement agressives, j’avais les doigts enfoncés dans mes oreilles. Ça m’a un peu sorti de l’émotion du spectacle. Mais quel revirement avec la Part V que je n’ai pas vue arriver ! Rupture de style avec Franck Sinatra et une danse qui a, sans crier gare, fait monter des sanglots dans ma gorge.
Le ballet est soigné jusqu’à la dernière minute. Alors que le public est debout et ovationne les artistes, le salut est comme une sixième partie dansée. Génial !
On en redemande !
Vraiment, Hofesh Shechter est un chorégraphe dont vous devez noter le nom. Ses spectacles doivent être vus, c’est incontestable. Pour ma part, je ne regrette pas les heures de route que j’ai faites pour aller jusqu’à Foix ni la petite frayeur au début du spectacle quand j’ai cru que j’étais venu pour rien.
J’ai été ravi de découvrir L’Estive, une salle de spectacle vraiment sympa avec un personnel au top et une programmation qui prouve que les villes de Province ne sont pas en reste niveau culture ! Je pense que toute l’Ariège peut être fière d’avoir des salles de spectacle comme celle-ci pour diffuser des spectacles de qualité.
Quant à moi, vous pouvez être sûrs que vous me verrez désormais dans les salles de spectacle à Toulouse et dans les alentours dès qu’Hofesh Shechter et ses danseurs reviendront !
Photo de couverture : Shechter II – Contemporary Dance 2.0 © Tom Visser
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.