L’auteur russe contemporain Ivan Viripaev est de retour sur Culture déconfiture, avec la pièce Insoutenables longues étreintes qui se joue actuellement au Théâtre de la Cité (Toulouse). Après Illusions, qui figurait dans les meilleurs pièces vues en 2015, et Danse “Delhi” programmé la saison dernière à Toulouse, c’était un plaisir d’aller découvrir une nouvelle pièce de ce grand auteur, mise en scène par Galin Stoev.
Petit dispositif scénique pour cette pièce : le spectacle est joué au CUB, la petite salle du Théâtre de la Cité. Deux couples se font et se défont sous les yeux des spectateurs, qui écoutent le récit polyphonique de leur “insoutenablement longue étreinte“. Comme souvent chez Viripaev, les personnages parlent directement aux spectateurs, la pièce est une alternance de monologues où chacun va raconter sa version de l’histoire, parlant de soi à la troisième personne. Si vous n’allez pas voir le spectacle, la pièce peut être lue comme un récit.
Et voici la lecture qu’en fait son metteur en scène, Galin Stoev :
Je lis cette histoire comme un voyage initiatique au cours duquel, pour accéder à la lumière, il faut d’abord descendre dans les ténèbres les plus profondes et même traverser la mort.
C’est une quête effrénée du plaisir à tout prix, une recherche d’intensité par le sexe, la drogue, la violence mais qui dévoile surtout la désorientation et une perte de repères. Tout cela, avec le désir profond de trouver du sens, de l’amour et de la liberté. C’est un voyage qui, avec humour, tendresse et poésie nous renvoie à nos propres questions sans réponse.
La première fois que j’ai vu un spectacle de Galin Stoev, c’était à la Comédie Française en 2012. Il venait de mettre en scène Le jeu de l’amour et du hasard de Marivaux. Quel rapport entre cet auteur classique du dix-huitième siècle et le dramaturge russe contemporain ? En fait, les deux ne sont pas si éloignés : ils décortiquent les subtilités du coeur humain, utilisent le langage comme révélateur pour mettre en lumière les passions que l’on voudrait garder secrètes. Une question qui, semble-t-il, taraude Galin Stoev depuis plusieurs années.
Insoutenables longues étreintes n’est pas la pièce que j’ai préférée de Viripaev, car je me suis un peu perdu dans sa deuxième partie surnaturelle et cosmique (où parlent des dauphins bleus, oui, oui) alors même que c’est à ce moment-là que les personnages comprennent mieux le sens de leur vie. Alors que la lumière entrait sur la scène, j’avais un peu l’impression de m’enfoncer de plus en plus dans l’obscurité… Matière à cogiter.
En tous cas, cette pièce m’a confirmé que le Théâtre de la Cité avait pris un excellent virage en changeant de directeur, et j’espère que Galin Stoev continuera de mettre en scène les pièces de Viripaev à Toulouse, et d’autres auteurs de l’Est que l’on a trop peu entendus jusqu’à présent.
Allez je vous laisse sur le générique d’H2G2, auquel j’ai beaucoup pensé pendant ce spectacle : “Salut et merci pour le poisson !”
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.