Home À lire La Bombe, Alcante, Bollée et Rodier [CRITIQUE]

La Bombe, Alcante, Bollée et Rodier [CRITIQUE]

by Julien
La bombe Alcante Bollee Rodier Glénat © Culture déconfiture

La Bombe est un roman graphique monumental créé par Didier Alcante, Laurent-Frédéric Bollée (tous deux au scénario) et Denis Rodier (au dessin). Composée de 450 pages et entièrement en noir et blanc, cette œuvre nous plonge dans le contexte complexe et les événements marquants qui ont conduit au développement et à l’utilisation de la bombe atomique en août 1945.

La Bombe : un voyage historique et géographique

Au fil de ses chapitres, La Bombe nous fait voyager à travers le monde pour découvrir les coulisses et les acteurs clés de cet événement historique. Des mines d’uranium du Katanga jusqu’au Japon, en passant par l’Allemagne, la Norvège, l’URSS et le Nouveau-Mexique, le lecteur est témoin d’une succession de faits incroyables mais véridiques. Certains de ces événements ont d’ailleurs donné lieu à des films (comme Les Héros de Télémark en 1965 avec Kirk Douglas, sur le sabotage de l’usine d’eau lourde en Norvège par les commandos Grouse et Gunnerside).

Ce roman graphique se distingue par son impressionnant travail d’enquête et de reconstitution historique, offrant une vision détaillée et nuancée des événements, qu’ils soient scientifiques, militaires ou politiques.

L’originalité tient au fait que l’histoire est racontée par un narrateur des plus originaux : l’uranium. Le prologue nous raconte ses origines et sa découverte en 1789, puis ses usages jusqu’en 1945 et l’explosion de la bombe atomique.

Les acteurs de l’histoire

Comme j’ai mis un mois à lire cet énorme roman graphique, j’ai parfois un peu perdu le fil entre les nombreux protagonistes de cette histoire. L’épilogue néanmoins est très bien fait pour faire un peu le point sur tous ces personnages.

Les décideurs politiques sont essentiels dans ce récit. La Bombe raconte cette histoire à hauteur d’hommes et met d’abord en lumière les décideurs politiques comme Roosevelt et Truman, dont les décisions ont été cruciales dans le développement et l’utilisation de l’arme atomique. Leur rôle et leurs dilemmes sont explorés en profondeur, permettant de comprendre les enjeux politiques de l’époque.

La bombe Alcante Bollee Rodier Glénat
La Bombe (Alcante, Bollée & Rodier – éditions Glénat)

Les scientifiques de renom tels qu’Einstein, Oppenheimer et Fermi occupent une place centrale dans le récit. Leurs contributions scientifiques et leurs dilemmes éthiques sont présentés de manière détaillée, offrant un éclairage sur les motivations et les hésitations de ces grands esprits face à la création d’une arme de destruction massive. Mais des héros méconnus sont également mis en avant. Ainsi, Leó Szilárd est l’un des protagonistes principaux : ce scientifique a d’abord poussé les États-Unis à développer la bombe, avant de tout faire pour empêcher son utilisation.

On découvre aussi Ebb Cade, un ouvrier afro-américain à qui l’on a injecté du plutonium à son insu pour en étudier les effets sur la santé, et Leslie Groves, le général qui a dirigé d’une main de fer le Projet Manhattan.

Côté japonais, les scénaristes ont imaginé Naoki Morimoto, qui incarne le destin de milliers d’habitants d’Hiroshima. Pour suivre toutes les trajectoires, il faut rester bien concentré !

Hiroshima : une reconstitution authentique

Le roman graphique ne manque pas de reconstituer de manière authentique la ville d’Hiroshima et la vie de ses habitants. Cette approche humanise le récit, rappelant que derrière les grandes décisions et les avancées scientifiques se trouvent des vies humaines bouleversées par la guerre et la technologie. C’est d’ailleurs le traumatisme d’Hiroshima qui a donné envie à Didier Alcante de raconter cette histoire (comme nous le dévoile la passionnante postface).

Un an après le succès du film Oppenheimer (dont Charlotte nous a parlé avec beaucoup d’enthousiasme), difficile de ne pas être tenté d’établir une comparaison. Pour moi qui me suis fermement ennuyé devant Oppenheimer, la bande dessinée La Bombe s’est révélée bien plus touffue et intéressante. Le format du roman graphique permet une exploration plus approfondie et nuancée des événements et des personnages, offrant une immersion totale dans cette période historique complexe et dramatique.


La Bombe est une œuvre incontournable pour quiconque s’intéresse à l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, à la science et à l’éthique. Par son approche détaillée et humaine, ce roman graphique réussit à capturer la complexité des événements et des décisions qui ont mené à la création et à l’utilisation de la bombe atomique, faisant de cette lecture une expérience à la fois éducative et émouvante.

Qui a écrit cet article ?

culture déconfiture Julien

Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.

You may also like

Leave a Comment

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.