Romain Gary est un auteur que vous êtes nombreux à apprécier, pourtant peu connaissez L’Angoisse du roi Salomon, roman qu’il a signé sous le pseudonyme d’Émile Ajar. Voilà cette injustice réparée avec son adaptation théâtrale par Denis Rey actuellement au Théâtre du Pavé.
L’Angoisse du roi Salomon en quelques mots
Salomon Rubinstein est le roi du prêt-à-porter : ancien tailleur, on le surnomme même « le roi du pantalon ». Lorsque Jean (notre héros incarné par Denis Rey) fait sa connaissance dans le quartier du Sentier à Paris, Salomon est déjà un vieil homme qui a fait fortune. Il se consacre désormais à la bienfaisance et héberge chez lui l’association « SOS Bénévole » comme pour réparer les injustices dont Dieu lui-même ne semble plus se préoccuper.
Une amitié va naître entre le vieil homme et Jean et va entraîner d’autres rencontres, notamment celle de Cora Lamenaire, ancienne chanteuse réaliste, et Aline, une libraire.
Un seul en scène captivant
Bien que les personnages soient nombreux, Denis Rey est seul en scène pour tous les faire vivre. Le décor est minimaliste : un porte manteaux et une chaise à roulettes. Cela lui suffit pourtant pour incarner tour à tour chacun des protagonistes de cette histoire tendre et drôle.
Je me laisse penser par les personnages, je me laisse hypnotiser par eux, dans cette fringale que j’ai de vivre une multiplicité de vies différentes – les plus différentes possibles. C’est un processus de mimétisme qui est au fond celui d’un acteur… Je pense d’ailleurs que tout romancier est un auteur-acteur.
Romain Gary, La nuit sera calme
On retrouve dans cette histoire tout l’humour de Romain Gary. C’est souvent mordant, mais cela fait toujours mouche. J’étais présent à la première du spectacle et les rires fusaient, car il faut bien dire que cette galerie de personnages est truculente.
Comme dans Gros-Câlin, on ressent cet espèce de décalage entre les personnages et le monde dans lequel ils vivent. Un peu comme s’ils étaient toujours à côté de leurs pompes. Mais c’est peut-être ce qui les aide à vivre et à supporter ce que le réel a d’intolérable.
J’aime beaucoup ces spectacles qui reposent sur le talent du comédien. Récemment, je vous parlais de La Fugue de Thibaut Prigent, ou bien Phèdre ! avec Romain Daroles. On est ici dans le même état d’esprit : pas de fioritures, quelques codes faciles à intégrer et surtout beaucoup de virtuosité. L’Angoisse du roi Salomon est un spectacle que je vous conseille vraiment sans aucun bémol. La pièce se joue au Théâtre du Pavé jusqu’au 19 mars à 20h30. Les samedis, le spectacle est précédé à 17 heures de Gros-Câlin, du même Romain Gary et avec le même Denis Rey.
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.