Les idoles de Christophe Honoré, ce sont Jean-Luc Lagarce, Bernard-Marie Koltès, Hervé Guibert, Serge Daney, Cyril Collard et Jacques Demy. Leur point commun ? Tous terrassés par le SIDA. Christophe Honoré imagine la rencontre post-mortem des idoles de sa jeunesse, entre débat, rigolade et crèpes-party…
Christophe Honoré est un habitué du Théâtre de la Cité. En 2012, il avait présenté Nouveau Roman, où il partait à la rencontre d’écrivains d’une autre génération. En 2015, nous avions vu et adoré Fin de l’Histoire, d’après Gombrowicz. C’est avec plaisir que nous nous sommes rendus au Théâtre de la Cité cette année encore pour voir cette nouvelle création dans laquelle il renoue avec des obsessions intimes : le rôle de l’artiste, les conséquences du SIDA.
La question du HIV est récurrente dans les oeuvres d’Honoré. Dès son premier roman Tout contre Léo, il abordait déjà la question. Dans ses films aussi le sujet est récurrent, ne serait-ce que dans son dernier long métrage : Plaire, aimer et courir vite, qui se déroule dans les mêmes années que celles où sont parties les idoles de son spectacle.
Marlène Saldana (Jacques Demy), Youssouf Abi-Ayad (Bernard-Marie Koltès) et Marina Foïs (Hervé Guibert) dans “Les Idoles” de Christophe Honoré
Pendant 2h30, en quinze séquences, aucun temps mort. Danse, dialogues, monologues, chant alternent et rythment le spectacle, nous faisant passer du rire aux larmes. Aucun réalisme dans cette rencontre surréaliste, où les rôles masculins sont distribués même à des comédiennes (Marina Foïs en Hervé Guibert et Marlène Saldana en Jacques Demy). C’est cette même Marlène Saldana, que j’avais tant aimée dans Fin de l’Histoire, qui offre à nouveau les meilleurs moments du spectacle, passant en une fraction de seconde du rôle de Jacques Demy à celui d’Elizabeth Taylor, à la fois si exubérante et si émouvante dans son activisme.
Deux moments m’ont vraiment bouleversé. Le premier : le récit de la fin de vie de l’acteur hollywoodien Rock Hudson, que je ne connaissais que de nom. Puis la grande scène de Marina Foïs : la mort de Muzil (le double de Michel Foucault dans A l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie). Ces deux scènes, qui narrent des épisodes similaires en de nombreux points m’ont rappelé la terreur irrationnelle que provoquait le SIDA aux débuts de l’épidémie, et le calvaire vécu par les premières victimes, mises au ban de la société. Un récit édifiant, à couper le souffle !
Jean-Charles Clichet (Serge Daney) et Harrison Arevalo (Cyril Collard) dans “Les Idoles” de Christophe Honoré
Heureusement, d’autres passages ont détendu l’atmosphère : la crèpe-party organisée par Jacques Demy pendant que Bernard-Marie Koltès dansait sur Staying Alive (surréaliste je vous dis !) ou le délire brésilien de Cyril Collard massacrant une pastèque à la machette, se trémoussant en mini-short sur Despacito ! Si vous ne comprenez pas le délire ? C’est normal, il faut l’avoir vu… J’ai adoré le mélange des styles et les invraisemblances !
Encore une fois, Christophe Honoré fait un carton-plein avec son spectacle Les Idoles. Alors que son cinéma me laisse parfois sur ma faim, je ne suis jamais déçu d’aller voir ses spectacles au théâtre. Ma seule déception : aucun texte n’a été édité pour l’instant, donc impossible de se le procurer… Mais j’espère qu’on le trouvera prochainement en librairie, car j’adorerais m’y replonger et me remémorer ces superbes témoignages et cet excellent moment de théâtre.
Retrouvez Les idoles à Marseille du 8 au 10 novembre, à Douai du 15 au 17 novembre, à Rennes du 23 au 30 novembre, à Poitiers du 12 au 14 décembre, à Paris du 11 janvier au 1er février (Odéon), à Hérouville-Saint-Clair du 6 au 7 février, et à Montbéliard du 14 au 15 février. Bon spectacle !
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.
