Décidément, Christophe Honoré est un touche-à-tout ! Alors que son spectacle Fin de l’Histoire est à l’affiche de nombreux théâtres pour la saison 2015-2016, il revient sur nos écrans de cinéma avec une adaptation des Malheurs de Sophie d’après le roman pour enfants de la Comtesse de Ségur.
Honoré a déjà publié de nombreux ouvrages pour la jeunesse (18 titres sur sa page wikipédia), mais son cinéma s’adresse généralement à un public plus mature, adulte ou adolescent. Il concilie pour la première fois ces deux univers.
Sa nouvelle version des Malheurs de Sophie nous replonge dans l’aristocratie du milieu du dix-neuvième siècle, avec de somptueux décors et costumes du Second Empire. Sophie y est incarnée par l’espiègle Caroline Grant parfaitement dirigée, à la fois attendrissante et vraie tête-à-claques. Elle est d’abord élevée par sa mère neurasthénique et démissionnaire (jouée par l’actrice iranienne Golshifte Farahani qui peine à articuler correctement son texte) puis passe sous la tutelle d’une belle-mère aussi cruelle que ridicule (campée par une Muriel Robin à qui le rôle sied à merveille). A choisir, j’aime autant la seconde aussi méchante soit-elle, que la première plus molle qu’une chiffe. Cette belle-mère, Madame de Fichini, s’exprime dans un franglais d’un snobisme exquis et c’est également à elle que l’on doit les répliques les plus drôles du film, notamment ce constat sans appel à propos de son personnel de maison : « Il faut bénir le Ciel de la laideur des petites gens ! ». On adressera également un clin d’œil respectueux à Michel Fau, qui interprète le père Huc, ancien missionnaire en Chine qui s’adonne à un ridicule tour de chant en mandarin digne de ses prestations burlesques dans le Récital Emphatique.
Ce n’est pas la première fois que Christophe Honoré s’essaye à l’adaptation de classiques littéraires. Il avait commencé en 2008 avec La belle personne d’après La Princesse de Clèves, où il avait transposé avec intelligence la Cour des Valois dans une cour de lycée ! S’en étaient suivies en 2014 Les Métamorphoses d’après Ovide, dans un cadre également contemporain. Les Malheurs de Sophie sont une adaptation plus classique et plus fidèle, mais on y retrouve néanmoins les marottes du réalisateur : le mélange des genres (superbes animaux en animation), les parties chantées (excellentes partitions et paroles d’Alex Beaupain, son éternel acolyte) et la présence d’un beau garçon torse nu (David Prat, car il faut bien choyer son public gay qui suit chacune de ses créations).
En bref, Les Malheurs de Sophie est un excellent métrage à voir en famille, si vous ne craignez pas que son héroïne ne donne de mauvaises idées à vos têtes blondes !
Qui a écrit cet article ?
Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.