A partir de demain – 15 avril 2016 – et jusqu’au mardi 26 avril, les Toulousains auront la chance de voir (et surtout d’entendre) Les Noces de Figaro de Mozart au Théâtre du Capitole ! J’ai eu le bonheur d’assister à la répétition générale du spectacle hier : ce fut un succès !
Avant même le début du spectacle, les spectateurs peuvent voir sur la scène l’immense reproduction d’une fresque de Francisco Bayeu, La Chute des Géants, devant laquelle se trouve un lit au sommier démonté. La première note n’a pas encore retenti que tout est dit dans cette scénographie : un vent révolutionnaire va renverser la société d’Ancien Régime sur fond d’imbroglios sentimentaux et adultères ! Car bien qu’il soit moins virulent que la pièce de Beaumarchais dont il est l’adaptation, l’opéra fut néanmoins créé pour la première fois en 1787, soit deux ans avant la Révolution Française… La Chute des Géants, donc !
Quant à l’intrigue sentimentale, elle tient en quelques mots : le jour du mariage de Figaro (valet du comte) et de sa belle Suzanne (camériste de la comtesse), une foule d’obstacles va se dresser pour empêcher les tourtereaux de convoler. Tout d’abord, le comte Almaviva qui a des vues sur Suzanne va tenter de restaurer son droit de cuissage, tandis que la vieille Marceline (douairière du château) va pour sa part intenter un procès à Figaro pour le forcer à la prendre pour épouse au lieu de la jeune camériste… Ajoutez à cela les bleus à l’âme de la comtesse éconduite, les charmes d’un jeune page volage, l’ingénuité d’une servante maladroite, la jalousie revancharde d’un vieux barbon… mélangez le tout pendant quatre actes et voilà votre opera buffa à point ! Régalez-vous !
Ce qui est appréciable dans la mise en scène de Marco Arturo Marelli, c’est qu’il n’a pas cherché à transposer la pièce ni à bousculer les conventions. Son dispositif scénique et ses costumes sont définitivement ancrés dans le dix-huitième siècle. La modernité tient plutôt à la manière de structurer l’espace au moyen des panneaux modulables qui permettent de transformer les lieux en un clin d’œil et de donner à voir aux spectateurs successivement la chambre de Figaro, celle de la comtesse, un tribunal, une salle de noces et un grand jardin. A l’image de son héros, cette mise en scène est dans un mouvement perpétuel qui sied parfaitement à ses rebondissements et ses nombreux retournements de situation !
La seule chose que je puisse regretter (mais qui est malheureusement systématique dans les salles à l’italienne comme le Théâtre du Capitole), c’est qu’en étant placé sur le côté de la salle, j’ai été privé de la vision d’une partie de la scène (en l’occurrence, le côté cour) où malheureusement se déroulait essentiellement le jeu pendant le premier acte… Heureusement, la mise en scène était plus centrale pendant les actes suivants.
La musique enfin (comment ne pas avoir commencé par là ?) est renversante ! Chaque air vous est familier tant la musique de Mozart a été jouée, reprise et détournée… Personnellement, j’ai toujours l’impression qu’on va me vendre des Farfalles quand j’entends Non piu andrai, ou une pizza au son de Voi che sapete ! Plus sérieusement, Attilio Cremonesi à la direction musicale a suscité une ovation chez les spectateurs et les chanteurs ont subjugué (même s’ils ne semblaient pas au maximum de leurs capacités pour cette générale) !
Anecdote rigolote : pendant l’entracte j’ai entendu deux collégiens qui se demandaient : « Il y avait déjà des opéras avec des personnages de lesbiennes à l’époque de Mozart ? » car le personnage du jeune page Chérubin était interprété par une ravissante soprano… Eh oui, c’est une convention à l’opéra que d’attribuer le rôle des jeunes garçons à des cantatrices afin d’imiter la voix d’un enfant qui n’aurait pas mué. Manifestement, ces collégiens n’avaient pas été avertis, et ils ont du trouver l’intrigue d’autant plus complexe au moment où ledit Chébrubin se travestit et se fait passer pour une demoiselle… Une femme qui joue un jeune homme déguisé en femme, c’est tordu !
Bref, je ne saurais trop vous conseiller d’aller voir ce magnifique spectacle des Noces de Figaro si tant est qu’il y ait encore des places à la vente, c’est un ravissement pour les yeux et pour les oreilles !
Qui a écrit cet article ?
Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.