Dans le dernier film de Pedro Almodóvar Madres paralelas, le cinéaste espagnol interroge à la fois la maternité (c’est dans le titre) mais plus largement la question de la famille et de la transmission. Depuis Tout sur ma mère il y a plus de 20 ans, je pense avoir vu tous les films d’Almodóvar au cinéma. Je vous ai parlé sur le blog du sublime Douleur et gloire ici et de Julieta là. On retrouve dans chacun de ses films la signature du réalisateur mais pourtant il parvient à ne jamais se répéter et continue de surprendre. Dans Madres paralelas, il signe une nouvelle collaboration avec son actrice fétiche Penélope Cruz à qui il a encore confié un rôle sur mesure.
Madres Paralelas en résumé
On entre très rapidement dans le vif de l’histoire dans ce nouveau film. Le scénario ne s’embarrasse pas de détails superflus et présente en quelques minutes les personnages principaux, à commencer par la photographe quadragénaire Janis (Penélope Cruz) et l’adolescente Ana (Milena Smit) qui font connaissance à la maternité lors de leur accouchement car elles partagent la même chambre. Une amitié va naître entre les deux mères et l’on va, à travers ce film, suivre les deux personnages et leur expérience de la maternité.
Dans le même temps, Janis fait appel à Arturo (Israel Elejalde), un anthropologue qu’elle charge de retrouver la dépouille de son grand-père assassiné pendant la guerre d’Espagne. Quant à Ana, elle tente de trouver sa place de fille auprès de Teresa (Aitana Sánchez-Gijón), une actrice mature qui voit tardivement sa carrière théâtrale prendre son envol.
Un casting cinq étoiles
Le film est terriblement efficace. Alors que le scénario ne comporte quasiment aucun élément de suspense (Almodóvar les désamorce tous), on ne voit pas le temps passer. Les personnages féminins crèvent l’écran et la manière dont elles sont filmées leur confère une stature iconique. Même les personnages secondaires sont denses, comme par exemple l’incontournable Rossy de Palma qui incarne l’amie de Janis. Evidemment, Penélope Cruz écrase un peu Milena Smit… mais la jeune actrice parvient à faire exister son personnage ce qui n’est pas une moindre chose quand on partage l’affiche avec la comédienne la plus incandescente de la péninsule ibérique.
J’ai aussi particulièrement le montage, avec ses transitions old school sur des fondus au noir. Formellement, le film est d’un classicisme des plus stricts et c’est aussi ce qui m’a plu. Quand l’histoire est bonne, pas besoin de s’embarrasser d’autres effets, comme des musiques tapageuses ou des plans tarabiscotés.
Un scénario bicéphale
On pourrait reprocher au scénariste de poursuivre deux lièvres à la fois. L’histoire qui lie Ana et Janis pourrait sembler indépendante de la quête personnelle que fait Janis au sujet de son grand-père. Pourtant, imperceptiblement, on sent qu’il y a entre l’histoire intime de ces femmes et la grande Histoire de l’Espagne contemporaine un lien ténu, cette nécessité de faire la lumière sur le passé afin de pouvoir solder ses comptes et aller de l’avant. L’ultime séquence du film est pour moi digne d’un chef-d’œuvre.
Êtes-vous aussi des inconditionnels d’Almodóvar ? Êtes-vous allés voir Madres paralelas et qu’en avez-vous pensé ?
Qui a écrit cet article ?
Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.