Cette semaine, je me suis plongé dans le deuxième livre de la maison d’édition La 21ème saison. Adapté de sa pièce Libre(s), le roman On ira voir la mer demain. Ou dimanche. de Marie-Cécile Fourès plonge le lecteur dans un huis clos familial intense. Ne vous fiez pas à son petit format (17x11cm) ni à sa faible épaisseur (une centaine de pages) : ce roman aborde des sujets majeurs. Autour d’un café, Paul et sa mère Pascale se confrontent à un passé douloureux, exhumant les souvenirs d’un drame longtemps enfoui. Au fil des pages, la vérité se révèle, entre silences lourds et dialogues percutants.
On ira voir la mer demain. Ou dimanche. Un récit de fiction aux échos universels
Si l’histoire de Paul et sa mère est purement fictionnelle, elle résonne pourtant avec de nombreuses réalités familiales. Des histoires que l’on voit malheureusement trop souvent narrées dans les pages « faits divers » des journaux. Ici, le roman prend la forme d’un dialogue (un choix peu étonnant, puisqu’il s’agit d’une adaptation d’une pièce de théâtre de la même autrice, dans laquelle le dialogue est donc la matière première), émaillé de lettres manuscrites insérées entre les chapitres.
Entre les lignes, insidieusement, éclate l’histoire de Pascale. Prise dans l’étau du patriarcat familial, de sa naissance à la rencontre de celui qu’elle aime et avec qui elle aura un petit garçon. Sa vie faite de coups et d’injonctions, de soumission à un homme, à un système qui nie la femme est bouleversante.
Sylvie Désiré, directrice de l’association Olympe de Gouges
En mettant en lumière les non-dits et les blessures générationnelles, Marie-Cécile Fourès explore avec justesse la complexité des relations parent-enfant face à la tragédie. Le roman parvient ainsi à toucher par sa sincérité et la délicatesse de ses émotions.
Une adaptation réussie du théâtre au roman
On a l’habitude de voir des romans adaptés au théâtre. L’inverse est plus rare. Pourtant, On ira voir la mer demain. Ou dimanche. est tiré de la pièce Libre(s) et tente d’en conserver la tension dramatique. Les dialogues et la narration (qui oscille entre la troisième et la première personne du singulier) ainsi que l’espace confiné du café où se joue ce huis clos, participent à la sensation d’urgence et de vérité qui habite chaque page.
Le pari était risqué, mais l’autrice est néanmoins parvenue à transformer l’expérience scénique en œuvre littéraire sans perdre l’intensité de la parole théâtrale.
Nous considérons qu’écrire de la fiction c’est écrire le monde. Ce livre contribue à la connaissance des implications sociales et familiales qui dépassent le drame et son issue.
La 21ème saison
Un roman engagé au service des victimes
Au-delà de son aspect littéraire, On ira voir la mer demain. Ou dimanche. trouve une place particulière dans le cadre de la prévention et du soutien aux victimes. Sollicité par des associations engagées dans l’accompagnement des familles (comme l’association Olympe de Gouges), il devient un outil de sensibilisation, permettant d’ouvrir le dialogue sur des sujets sensibles et souvent tabous. En donnant voix à des blessures silencieuses, Marie-Cécile Fourès offre un récit puissant, à la fois intime et profondément collectif.
La 21ème saison est une maison d’édition dont on ne demande désormais qu’à découvrir d’autres publications.
Qui a écrit cet article ?
Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.
2 comments
C’est “drôle”, dès que j’ai lu le titre de cet article, j’avais le cœur serré. Je voudrais bien que tu me prêtes cet ouvrage, ta critique me donne vraiment envie de le découvrir.
Avec plaisir. Tu vas voir, c’est très court.