Retour aux sources pour Peter Brook, le metteur-en-scène nonagénaire qui a présenté en fin de semaine son nouveau spectacle Battlefield, d’après le Mahabharata (l’une de ses œuvres les plus célèbres) trente-deux ans après sa création.
L’antique épopée indienne est aujourd’hui présentée dans une version courte d’à peine plus d’une heure (ou plutôt un épilogue inédit) dans un espace épuré : un parterre ocre et quelques bambous érigés pour figurer une clairière. Le metteur-en-scène qui a théorisé le vide et le silence au théâtre s’en tient à ses fondamentaux pour raconter au son d’un djembé cette belle épopée à hauteur d’enfant.
En résumé : Le prince Yudishtira, vainqueur d’une guerre fratricide, doit régner sur un royaume dévasté qui a été le théâtre de crimes auxquels il a pris part. Comment retrouver la paix intérieure et se montrer à la hauteur lorsque tant de remords hantent son esprit ? Sa mère, son oncle et son grand-père vont tour-à-tour lui conter des fables afin de lui faire comprendre le sens de sa vie et l’aider à affronter son destin.
Mon avis : Si, au premier abord, ce récit semble un peu simpliste et enfantin, il est porté par un quatuor de comédiens hors-pair qui lui donnent une grande puissance. On pense au Prophète de Gibran ou au Petit Prince de Saint-Exupéry, ces récits qui parlent à chacun par leur simplicité et leur pureté.
Les acteurs ne se contentent pas de jouer les protagonistes de l’épopée. Par le pouvoir de l’évocation, ils deviennent tour-à-tour les héros des fables qu’ils se racontent. Qui une mangouste, qui un pigeon, qui un ver-de-terre, qui le Gange, qui la Mort… Incroyable de voir comment ces petites-bêtes et ces concepts prennent vie sur le plateau avec un minimum de moyens. Mais n’est-ce pas ce que l’on recherche lorsque l’on va voir une pièce de Peter Brook ?
Si vous en avez l’occasion, allez applaudir Carole Karemera, Jared McNeill, Ery Nzaramba et Sean O’Callaghan et surtout amenez-y vos enfants (à partir du moment où ils sont en âge de lire les surtitres, car le spectacle est en anglais) !
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.