Un Richard III en rock-star décadente ? Why not ? C’est le postulat de départ de Thomas Jolly, qui a mis en scène la tragédie de Shakespeare en tournée en 2016. 4h30 de hurlements et de bruit, de stroboscopes et de lasers… « Beaucoup de bruit pour rien », diront certains sans avoir peur du jeu de mots. Pour ma part, j’ai été très mitigé en voyant ce spectacle aussi branlant que son protagoniste.
Pour vous situer, Richard III fait suite à la trilogie Henry VI du même Shakespeare. Thomas Jolly avait fait sensation entre 2010 et 2014 lorsqu’il monta la trilogie en intégrale (soit 18 heures de spectacle, jouées lors du 68e festival d’Avignon). La performance avait subjugué la critique et le public. Pour ma part, je ne l’avais pas vue… Je connaissais néanmoins Thomas Jolly pour avoir vu Toâ de Sacha Guitry en 2009 qui avait été un choc esthétique et théâtral (probablement mon spectacle préféré cette année-là) ! Je m’étais promis de suivre un talent aussi prometteur et étonnant. Avec Richard III, c’est désormais fait ! Mais je dois avouer que l’essai n’a pas été transformé.
Les choix de scénographie et de mise en scène sont aussi radicaux que ceux d’Olivier Py lorsqu’il mit en scène le décrié Roi Lear, version grosse moto, néons et cruauté. Chez Thomas Jolly, le tyran adopte les codes vestimentaires et les attitudes d’une star pour adolescents (Tokio Hotel ?)… Look glam-rock, postures faussement provocatrices, jeu caricatural… Son couronnement se transforme en concert de rock entêtant où l’on encourage le public à reprendre le refrain en chœur : « I’m a dog, I’m a toad, I’m a hedgehog… ». C’est divertissant. C’est original (quoique). Mais ça ne pousse pas loin la comprenette.
(Cliquez sur les paroles pour voir le clip et making of du spectacle)
Pourtant, je dois avouer que je n’ai pas vu les 4h30 passer. Force est donc d’admettre que Thomas Jolly a relevé le pari de rendre digeste une pièce aussi longue, quitte à user et abuser des moyens les plus putassiers et racoleurs…
Je continue donc de croire en son talent et irai voir sans hésitation sa prochaine création, en espérant qu’il s’agira cette fois d’un projet plus modeste et qu’il saura endosser un rôle mieux taillé à sa mesure.
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.