Depuis le 24 octobre, les chorégraphes Edward Clug et Ángel Rodríguez présentent un programme exceptionnel à l’Opéra National du Capitole, sous la direction de Jordi Savall. Il s’agit de deux ballets, Sémiramis & Don Juan, dansés sur la musique de Christoph Willibald Gluck, que nous sommes allés découvrir samedi dernier pour notre plus grand plaisir.
Sémiramis & Don Juan, un programme qui peine à remplir
Je n’avais pas prévu d’aller voir Sémiramis & Don Juan ce mois-ci. Aucune image n’ayant filtré et l’Opéra ayant assez peu communiqué – jusqu’à la semaine dernière – sur ce programme, il était difficile de se faire une idée… Puis, récemment, j’ai appris que le Capitole mettait en vente les places de ce spectacle à -50%, un rabais tout à fait exceptionnel. Il a ensuite fallu que je voie les photos de la première pour me convaincre de prendre à mon tour des billets pour ce spectacle.
Il est assez rare de pouvoir se retrouver dans les places de la catégorie prestige à l’Opéra du Capitole pour seulement 20€. Pourtant, c’est actuellement possible. Dans la mesure où beaucoup de places sont encore à la vente, il m’a suffi d’acheter une place sur un strapontin puis de me déplacer au début du spectacle vers les meilleures places de l’orchestre qui étaient encore vacantes au commencement de la représentation. Le tour était joué !
Le manque d’engouement de la part du public pour ce diptyque est à peine explicable… Le spectacle est splendide, les danseurs du Ballet du Capitole sont talentueux (surtout dans Don Juan) et les places ne coûtent pas cher. Est-ce la présence des machines dans Toulouse qui a découragé les habitués de venir en ville ? Ou bien l’effet “vacances scolaires” qui fait que les Toulousains ont l’esprit ailleurs ? Ou tout simplement un fiasco de communication de la part de l’Opéra, qui n’a pas su hyper le public en mettant suffisamment en valeur les qualités de ces ballets ? Le mystère reste entier.
Deux ballets et une suite d’orchestre
Les ballets Sémiramis et Don Juan sont précédés d’une suite d’orchestre de Gluck, Iphigénie en Aulide. La musique, interprétée par le Concert des Nations, est magnifique. La présence de Jordi Savall à la direction musicale est toujours un grand événement, et une fois encore, le chef n’a pas failli à sa réputation.
Sémiramis est une pièce qui s’émancipe de l’argument traditionnel. Le chorégraphe Ángel Rodríguez s’est laissé porter par la musique pour raconter une histoire plus universelle que celle imaginée par Voltaire dans la tragédie de la reine Sémiramis. Dans cette nouvelle version, toutes les danseuses et danseurs sont vêtus de la même manière et forment un chœur qui célèbre de Femme avec un grand F.
Femme réelle, femme imaginée, femme créée, femme tissée sur les métiers à tisser de la vie et qui défend son pouvoir et sa beauté en luttant à travers le temps. Sémiramis est faite de chaînes et de trames superposées, où s’estompent les limites du personnage réel et légendaire, qui se transforme en un être « métamorphique », en un être infini. Je pense aux femmes fortes, aux femmes mères, aux femmes filles, aux femmes sœurs, aux femmes compagnes, aux femmes… à toutes les femmes du passé, du présent et de l’avenir.
Ángel Rodríguez
Ce que j’ai préféré dans ce ballet, c’est l’immense rideau de fond de scène aux reflets d’or qui s’élève lentement pendant les 25 minutes du ballet. Le rendu est splendide. Autre point d’intérêt : les parties dansées en silence entre les mouvements de la musique de Gluck, où l’on n’entend que les bruits des pieds sur la scène et la respiration des danseurs. Captivant.
Le ballet suivant, Don Juan, est celui qui m’a le plus intéressé. Alexandre De Oliveira Ferreira, dans le rôle titre, est magnétique. La pièce est à la fois drôle et sensuelle. Derrière les moucharabiehs, les regards lascifs tentent de capturer l’image de ce Don Juan auquel nul ne peut résister. Face à lui, Marlen Fuerte Castro est une Elvire incroyable de sensualité. J’ai vraiment adoré leur duo !
Bon plan
Profitez de la promotion toujours en cours jusqu’au 30 octobre : c’est -50% sur toutes les places en prestige, catégories 1 et 2 pour toutes les représentations ! L’insuccès de ce spectacle n’est vraiment pas justifié, mais si vous n’êtes pas des habitués de l’Opéra ou du Ballet, il faut peut-être y voir une chance inespérée de découvrir un spectacle de grande qualité dans des conditions uniques.
Pour ma part, je suis ravi d’avoir changé mes plans à la dernière minute et d’être allé voir Sémiramis & Don Juan, plutôt que d’avoir passé mon samedi après-midi à courir après des machines dans une pagaille urbaine épouvantable. Profitez-en, il est rare que des spectacles d’une telle qualité soient accessibles à des prix aussi bas et avec autant de places encore disponibles.
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