Cette semaine, je suis allé voir Les Amoureux de Marivaux à Odyssud (Blagnac). Un quatuor de jeunes comédiens y joue des scènes choisies de plusieurs pièces de l’auteur : La Surprise de l’amour, La Dispute, La Commère, La Méprise, L’heureux Stratagème… enchaînant rôles et situations comiques, les ponctuant de chansons d’amour de la variété française a capella, le tout dans une mise-en-scène signée Shirley et Dino !
Le duo formé par Gilles et Corinne Benizio (alias Shirley et Dino), s’est fait connaître auprès du grand public il y a deux décennies grâce à Patrick Sébastien et son émission du Plus grand cabaret. Vous connaissez forcément leurs personnages old-school, burlesques et attachants. Mais ils ont plus d’une corde à leur arc, et s’ils excellent au devant de la scène, ils sont également depuis plusieurs années metteurs-en-scène de spectacles dans lesquels ils n’apparaissent pas systématiquement. Pour ma part, je connaissais leur travail de mise-en-scène sur des opéras : La Belle-Hélène d’Offenbach et Le Roi Arthur de Purcell. Les deux spectacles m’avaient enchanté. Avec Les Amoureux de Marivaux, c’était la première fois que je voyais une mise en scène de textes classiques.
La troupe de comédiens qui interprète les extraits de Marivaux, Les Mauvais élèves, est pétulante et absolument loufoque. Les personnages qu’ils campent tour à tour font mouche à chaque réplique, mais aussi à chaque mimique. L’une des scènes que j’ai préférées est extraite de La Surprise de l’Amour, où Elisa Benizio joue une comtesse hystérique et d’une folle mauvaise foi, dans laquelle on peine à une pas reconnaître un double génial de Shirley ! Voix haut-perchée, airs outrés, postures ridicules… il n’y a pas un seul mot ou un seul regard qui ne fasse pas rire chez ce personnage ! Valérian Béhar-Bonnet qui lui donne la réplique ne sert ici que de faire-valoir, mais il trouve son heure de gloire plus tard dans le spectacle dans les scènes de L’heureux stratagème où il joue le valet Frontin, un vrai moment de bravoure qui m’a littéralement plié en deux !
De plus, le quatuor de Mauvais élèves touche à tout ! Les scènes sont ponctuées de chansons souvent en lien avec le thème de la scène jouée. J’ai particulièrement aimé la reprise de La plus belle pour aller danser de Sylvie Vartan pour illustrer la rivalité de deux jeunes femmes narcissiques dans La dispute. Parfois, le choix de chansons semble moins pertinent : par exemple, le final sur le tube de Polnareff Tout pour ma chérie m’a un peu échappé… Les transitions entre les scènes, enfin, sont également un petit point faible à ce spectacle par leur côté artificiel, mais il faut admettre qu’il est très difficile de présenter un spectacle comme celui-ci, constitué de scènes isolées qui ne sont pas liées narrativement.
En bref, si vous aimez l’humour et la folie de Shirley et Dino, n’hésitez pas à aller voir Les Amoureux de Marivaux si le spectacle passe près de chez vous, car vous retrouverez dans leur mise-en-scène tout ce qui fait la saveur de son duo ! Si vous êtes un amateur de l’humour classique de Marivaux, vous serez également comblés par cette lecture intelligente de ses œuvres et l’incarnation géniale des personnages, même si le côté « extraits » nous laisse un peu sur notre faim ! Enfin, si vous n’aimez que ce qui est sérieux, austère et intello… eh bien passez votre chemin, ce spectacle n’est pas pour vous !
Pour ma part, le pari des Mauvais élèves a été relevé : je suis retombé amoureux de Marivaux !
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.