Nous avons eu la chance d’être invités ce mois-ci au Théâtre La Bruyère (Paris) pour voir la pièce The Normal Heart, une reprise suite au succès que cette pièce a déjà connu à l’automne 2021 au Théâtre du Rond-Point. La pièce de Larry Kramer est mise en scène par Virginie de Clausade.
The Normal Heart, le théâtre au temps du Sida
L’action se déroule à New York en 1981. Une épidémie qui n’a pas encore de nom décime la communauté homosexuelle. Face au déni et à l’indifférence, Ned Weeks (Dimitri Storoge) s’indigne, met sa colère et son mauvais caractère au service d’un activisme sans concession, dénonce l’inaction, provoque des scandales médiatiques. Mais même dans son propre camp, tout le monde n’apprécie pas ses méthodes coup de poing, notamment son ami Bruce (Andy Gillet).
Larry Kramer ne vous est peut-être pas inconnu : c’est lui qui fonda l’association Act Up en 1987. La pièce The Normal Heart, qu’il écrivit deux ans plus tôt est donc plus qu’un acte littéraire, c’est une pièce militante et autobiographique. La scène lui sert alors de tribune pour donner de la visibilité à une épidémie qui ne dit pas encore son nom et à une communauté qui est encore fortement discriminée.
Il a été difficile pour moi de ne pas penser à une autre pièce que j’adore et qui aborde le même thème : Angels in America de Tony Kushner dont je vous avais parlé ici, mais qui utilise la voie de la métaphore là où Kramer propose un théâtre plus réaliste, voire documentaire.
Le succès de The Normal Heart
Depuis 1985, The Normal Heart a été plusieurs fois adapté, notamment en téléfilm en 2014. Mais c’est seulement en 2020 que la pièce est montée pour la première fois en France, alors que Larry Kramer venait de s’éteindre et qu’une nouvelle épidémie s’abattait sur le monde.
Comédienne et autrice, Virginie de Clausade adapte ce manifeste romancé, portrait d’une lutte enflammée et sans précédent. Il y est question de désir et de sexe, de combat et d’engagement, de peur et d’injustice, et surtout, partout, d’amour.
Dans cette mise en scène, j’ai surtout apprécié Déborah Grall, qui joue avec beaucoup de justesse le personnage d’Emma, docteure qui s’est engagée auprès de ses patients pour affronter la maladie alors que personne ne voulait faire front et que l’on racontait tout et n’importe quoi sur le Sida. Seul personnage féminin de cette pièce, elle est probablement celle avec qui j’ai eu le plus d’empathie. Bien entendu, les autres comédiens ne déméritent pas, notamment Andy Gillet qui, dans un monologue poignant, laisse se fendre la carapace du personnage raisonnable qu’il incarne.
The Normal Heart est à voir du mardi au samedi à 21 heures (et en matinée le samedi à 17h) jusqu’au 7 avril au Théâtre La Bruyère.
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.
